L\'Emir Abd el Kader

La longue marche à travers les siècles

DE MASSINISSA À DIDOUCHE, BENBOULAÏD, BEN-M'HIDI, KRIM, BITAT ET BOUDIAF

La longue marche à travers les siècles

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La longue marche à travers les siècles

Il n'y a pas eu de passage à vide dans notre Histoire. II n'y a jamais eu de répit. Chaque siècle et chaque période, qu'a connus l'Algérie, ont eu leur part d'événements et leurs hommes. C'est à travers ce climat que notre peuple, depuis Massinissa jusqu'à Larbi Ben M'Hidi et tant d'autres, en passant par l'Emir Abdelkader, a été habitué à combattre en permanence. II l'a fait hélas par nécessité, parce qu'il était contraint de se défendre contre des invasions multiples et, plus tard, contre cette colonisation oppressive du régime français. Il l'a fait parce qu'il voulait sauvegarder son unité, protéger son identité et réaliser l'ébauche d'une nation libre de développer sa civilisation autonome.

Le coup d'éventail: un prétexte
C'est pour cette raison que parler uniquement du 1er Novembre dans cet écrit, sans évoquer le juste combat du peuple depuis ce jour funeste du 5 juillet 1830 jusqu'à la guerre de libération qui nous a permis de recouvrer notre souveraineté nationale, c'est relater des «moments» forts, avec cette frustration de n'avoir pas fait une rétrospective de notre long processus de décolonisation à travers le temps. Ainsi, il est indispensable, pour comprendre la justesse de notre révolution, en ce 57e anniversaire de Novembre 1954, de revisiter notre combat depuis ce prétendu «coup d'éventail» du 30 avril 827. En effet, un «prétendu» geste qui, selon d'aucuns -les historiens bien-sûr -n'était qu'une simple algarade entre le dey et le consul de France, qui devenait un prétexte pour nous coloniser... Ainsi la France, par cet alibi, a légalisé son expédition sur Alger, en oubliant de préciser son endettement auprès de la Régence et ce qu'étaient ses visées expansionnistes qui s'inscrivaient dans le temps, depuis que Charles Quint et l'Espagne ont essuyé un désastre sur les plages de l'Agha, dans Alger même, et que Napoléon Bonaparte a pris l'île de Malte en 1782.
C'est depuis, qu'a commencé son plan de conquête jusqu' au 16 juin 1827 où le blocus sur les côtes algériennes a été décidé au moment où la quasi-totalité de la flotte algérienne se trouvait en Grèce. Oui, la France voulait disposer d'une colonie plus riche dans le continent africain. Un article du Courrier anglais du 26 juin 1830 confirme ce que nous avançons: «Les Français vont acquérir un Etat qui offre des ressources considérables... Peut-être n'y a-t-il pas un endroit mieux choisi pour débarrasser la France de la partie mécontente de sa population...».
Le premier débarquement de troupes françaises a eu lieu, à Sidi Fredj, le 19 juin 1830, le deuxième le 5 juillet, quelques jours après, avec 40.000 hommes, pour laver soi-disant cet affront de l'éventail. La France voyait ainsi la punition. Mais une farouche résistance lui a fait subir des pertes considérables, le cinquième de ses troupes. Cependant, si par la suite, le résultat en fut autrement -c'est-a-dire l'occupation du pays -c'est parce que la France a utilisé, plus que les envahisseurs que nous avions connus avant elle, des procédés autrement plus barbares que n'ont jamais vécus les Algériens depuis leur existence.
Les attaques françaises étaient beaucoup plus sauvages que ne l'ont été celles de l'escadre anglaise de Lord Exmouth, celle de l'Amiral Van Cappelen qui lança en 1816, à partir du port d'Alger 34.000 obus, ou celle de l'amiral Neal. De plus, la France a trahi les accords qu'elle a signés avec les beys d'Oran et de Tunis et fomenté des complots contre le bey de Constantine. Cela rentrait en droite ligne dans sa stratégie pour occuper rapidement les régions qui lui étaient difficiles. Elle avait ensuite trahi le traité qu'elle avait signé avec l'Emir Abdelkader, celui de la Tafna du 3 juin 1838 et son armée, qui n'avait rien à envier aux hordes vandales et mongoles, n'a épargné ni son trésor, ni sa riche bibliothèque.
L'Emir Abdelkader répondait toujours avec détermination à toutes les attaques, et ce n'est pas l'Histoire, falsifiée et remodelée dans certaines officines, qui démontrera le contraire ou atténuera le nationalisme par lequel a brillé cet héros national. Même ses ennemis reconnaissaient en lui la force de caractère, l'intelligence et l'autorité qu'il exerçait sur l'ensemble des tribus. Les généraux Clauzel, Trezel, Drouet d'Erlon, et consorts..,. célèbres par leurs comportements odieux, ont été frappés de stupéfaction et d'admiration devant l'ingéniosité et la virtuosité de l'Emir, depuis le début de la résistance jusqu'à «l'événement» de 1847 où hélas, il a été contraint d'abdiquer devant la sauvagerie, la traîtrise et les souffrances qu'endurait le peuple algérien, pendant ces quelques années de guerre.
En effet, la sauvagerie du général Rovigo doit être contée, pour révéler ce génocide du 6 avril 1832 où 12.000 Algériens ont connu une fin atroce. Des têtes tranchées et accrochées sur des lances, des membres arrachés, des mains de femmes coupées et encore ornées de bijoux... Tout ces «trophées» ont été exposés à la rue Bab Azzoun!!
Le général Savory, ancien préfet de police de Napoléon 1er, recommandait à ses soldats, dans un style lapidaire: «Des têtes!» Quant au maréchal Saint-Arnaud, le sanguinaire qui n'avait rien à envier à Tamerlan, le barbare, il reconnaissait lui-même sa sauvagerie en écrivant à son frère: «...Je brûle aujourd'hui les propriétés et les villages de Bensalem et de Belkacem Oukaci... Tu peux dire à Rousset que j'ai beaucoup détruit et brûlé. II a raison de me traiter de Goth et de Vandale.» De cela l'Histoire de France n'en dit mot, mais notre peuple se souvient.
Pour répondre à cette barbarie, nos combattants se distinguaient loyalement dans de grandes batailles. Citons, en janvier et février 1840, les batailles de la Macta, Mazagran, Mostaganem, Boufarik, Miliana, l'Arbaa Nath-Irathen, et les environs d'Oran, contre le maréchal Vallée et le général Bugeaud. Citons Constantine qui résista longtemps avec Ahmed Bey aux forces coloniales qui demandaient aux combattants leur reddition. «Sachez que la mort sous les remparts de Constantine vaut mieux que la vie sous l'autorité française», réponsaient ceux-là avec la fougue et le courage qui les animaient.
Blida et Médéa ont résisté sous le poids de l'horreur du sinistre Clauzel. Icherridene, en Kabylie, a défié en 1854 le maréchal Randon sous la bannière de l'héroïne Fatma N'Soumer.
En 1860, deux cent mille colons dépossédèrent les Algériens des meilleures terres et s'installèrent de force, et en 1864, la France opposa cent mille hommes au soulèvement des Ouled Sidi Cheikh, dans le Sud-Oranais.

L'insurrection de 1871
Les Algériens se soulèvent en 1871 pour généraliser le combat. Cette évolution, au plan militaire, n'a pas manqué de mettre en valeur la conscience politique des jeunes et oeuvrer pour les prémices d'un mouvement national de libération du pays. D'ailleurs, un officier français ne disait-il pas devant la commission parlementaire qui enquêtait sur les «dépassements» de l'armée coloniale: «Le sentiment national, dont ce serait une erreur de croire qu'il a disparu en Algérie, suffit à expliquer la révolte?...»
En 1871 l'Algérie connaît l'insurrection la plus longue et la plus généralisée de toutes celles qui eurent lieu avant la guerre de Libération de 1954. Elle commença avec l'attaque des Hanencha de Souk-Ahras, dirigés par Cheikh Keblouti (janvier 1871). Ce fut ensuite le soulèvement des Ouled Aïdoun dans le Sud-Constantinois (février 1871) puis celui des Nemencha et des Ouled Abid, répondant à l'appel de Mohieddine fils de l'Emir Abdelkader, aidé par Nacer Benchohra, de Laghouat qui le fait rentrer au pays par Oued Souf. Dans son appel lu dans toutes les Djemaâs, Mohieddine affirmait: «Le moment de votre délivrance est imminent.»
Le 15 mars 1871, le bachagha El Mokrani, ayant déjà soutenu la révolte du Cheikh Bouakaz, un proche de son père, en 1864-1865, écrivait au général Augeraud et au capitaine Olivier, les informant qu'il n'obéira plus à la France: «Je m'apprête à vous combattre, que chacun aujourd'hui prenne son fusil». Il déploie 15.000 hommes autour de Bordj Bou Arreridj. Le même jour, l'offensive est également lancée par les Hachem, commandés par son frère Ahmed Boumezrag.
El Mokrani s'allie à cheikh El Haddad. Ce dernier était à la tête de 100.000 hommes qui venaientt d'entrer dans la guerre sainte en une quinzaine de points entre Alger et Collo. Cheikh El Haddad avait lancé le 8 avril à Seddouk son appel au «djihad» et toutes les tribus, de la Mitidja à Skikda, ont répondu à son appel. Des groupes de partisans marchaient sur Batna et sur Sétif. En son temps, la Zaouia Er-Rahmania s'était chargée de balayer le pays de l'Est au Centre -, de Tébessa et Souk-Ahras jusqu'à la Mitidja -et d'installer des noyaux de jeunes dans chaque région, qui s'occupaient de la lutte et de la formation politique.
En mars 1871, les Chaâmba, au Sud, entraînés par Bouchoucha s'emparaient de Ouargla et les Ouled Sidi Cheikh reprenaient la lutte dans le Sud-Oranais.
Le 13 juillet 1871, Malek El-Berkani, ce héros des Beni-Menaceur, qui en faisait de même dans toute l'étendue du Titteri, mourut en pleine bataille, à Cherchell, non sans avoir fait subir de grandes pertes à l'ennemi.
Plus de 350 combats furent livrés par les patriotes algériens sur un territoire qui allait dans le Constantinois, de la Kabylie à Touggourt et Ouargla, dans l'Algérois, de la Mitidja à Cherchell, et dans l'Oranie, il s'étendait sur toute la région saharienne... La guerre ne s'était donc par arrêtée car, malgré le relatif échec militaire de cette première grande révolution -celle d'El Mokrani -Bouamama, un autre héros, soulevait, à son tour, toute la région Ouest du pays. Le peuple refusait d'abdiquer et, comme les combattants de Constantine, du temps d'Ahmed Bey, les jeunes de Bouamama, de Ouled Sidi Cheikh, de Ouled Naïl, des Chaâmbas, de In Salah, décidaient de ne pas lâcher prise et de mourir en héros pour libérer leur patrie.
Ainsi, les insurrections - en fait le mouvement national armé - n'a pas donné de répit à la France. Des grandes batailles jusqu'aux flambées isolées qui venaient pour braver «l'ordre» du colonialisme (celles de Benzelmat des Aurès, Ghomri d'Akbou et tant d'autres), l'Algérie n'a pas cessé de démontrer l'opposition et la colère de ses jeunes, de ses paysans et de ses travailleurs, en somme d'un peuple courageux et digne à la fois.
De cette insurrection des Mokrani, cheikh El Haddad et autres Bouamama et Malek El Berkani, jusqu'à l'appel du 1er Novembre, de nombreux événements, très significatifs et dominants, se sont déroulés sur l'ensemble du territoire avec cette constance obstinée qui menait le peuple droit vers sa libération. Ainsi, de 1911, à partir du mouvement du vénéré Cheikh Benyellès, patron de la Confrérie «Derqaouia», jusqu'à 1926, date à laquelle émergeait un jeune de vingt-cinq ans, Messali Hadj qui allait présider aux destinées de l'Etoile Nord-Africaine (ENA), ensuite à celles du PPA, en passant par la révolte des Aurès en 1916 et la bataille politique de l'Emir Khaled en 1919, tout le peuple militait contre la présence du colonialisme.

8 mai 1945, le génocide
Au cours de la Seconde Guerre mondiale, pendant que quelques élus algériens, choisis parmi les notables et dans le groupe de l'intelligentsia, réclamaient l'assimilation -ils pensaient acquérir le minimum -, d'autres militants, dans un autre mouvement politique, les AML (Amis du Manifeste et de la Liberté) dont la «cheville ouvrière» de l'édifice était le PPA, revendiquaient purement et simplement l'indépendance du pays. Cette demande ne pouvait agréer les autorités coloniales qui la prenaient pour une grave provocation de la part des «fauteurs de troubles». Alors, la réponse a été donnée au peuple le 8 mai 1945, ce jour où les forces éprises de paix et de liberté étaient sorties, à travers le monde, pour fêter la victoire sur le fascisme et le nazisme.
Auparavant, le 1er mai 1945, fête du travail, des cortèges parcouraient les rues d'Alger, d'Oran, de Sétif, de Blida et d'autres villes, conduits et encadrés par les militants du PPA qui brandissaient des drapeaux aux couleurs algériennes ainsi que des banderoles portant les inscriptions: «Libérez Messali», «Libérez les détenus», «Indépendance». La police intraitable a tiré, quatre hommes sont tombés, le drapeau déployé... Ces hommes ont pour noms: Ghazali El-Haffaf, Ahmed Boughlamallah, Abdelkader Ziar et Abdelkader Kadi.
Le 8 Mai 1945 - revenons à ce triste souvenir -, l'Est Constantinois, plus particulièrement, a été ébranlé..., les autres régions aussi, et le sang des innocents, morts pour une juste cause, a fertilisé la conscience nationale qui devait passer à un autre stade, plus ferme et plus éloquent dans la revendication des droits inaliénables.
Avec ce génocide, le colonialisme français pensait atténuerl'ampleur du nationalisme algérien. II s'était trompé car c'est à partir de là que les Algériens, après avoir juré sur la tombe de leurs martyrs, ont commencé à réfléchir sérieusement au déclenchement de la lutte armée.
En effet, quelques jours après ces massacres, le PPA «décida d'étendre l'action armée à tout le territoire national et d'ordonner l'insurrection générale. La date en fut fixée pour la nuit du 23 au 24 mai 1945», affirmait Benyoucef Benkhedda. Cependant, cette décision n'a pu être réalisée car beaucoup de difficultés ont fait obstacle. Il y a eu de nombreuses arrestations chez les responsables, ensuite et surtout la crainte d'un autre carnage au sein des populations. «Mieux valait la reporter afin de mieux préparer l'insurrection et éviter l'improvisation», s'exprimait, plus tard, Chawki Mostefaï, membre de la direction du PPA. Cependant, comme le contre-ordre lancé n'a pu parvenir à temps à tous les responsables, beaucoup d'actions ont eu lieu à la date prévue dans plusieurs régions du territoire national. Les armes ont parlé et la France a déployé, encore une fois, ses «remarquables dons» d'intimidation.

1er Novembre: le début de la fin
Ainsi, même si les événements de 1945 ont été de courte durée, ils ont «considérablement renforcé chez le peuple la conscience nationale et révélé au monde l'existence d'une Algérie à la recherche de son identité et de son indépendance» dira Benkhedda, dans son livre Les origines du 1er Novembre 1954. Effectivement, confirme Henri Alleg, dans La Guerre d'Algérie: «Dans l'horreur des massacres perpétrés sous leurs yeux, les jeunes pressentaient déjà confusément, qu'un jour, pour conquérir la liberté de leur peuple, il leur faudrait à leur tour entrer dans la fournaise.»
A partir de ce constat, les partis, le PPA qui devait changer de nom pour des raisons tactiques, le MTLD créé en 1946, l'UDMA présidé par Ferhat Abbas et crée également la même année, l'organisation des scouts qui a été ébranlée par de sauvages persécutions en 1947 et les Médersas de l'Association des Ouléma, constituaient cet ensemble homogène d'encadrement et de formation qui a donné la pépinière pour la révolution de Novembre. Les Ben Boulaïd, Ben M'Hidi, Lotfi, Belouizdad, Bouras, Souidani Boudjemaâ et des milliers d'autres n'étaient pas venus à la révolution, par hasard. Ils ont été les élèves de ces écoles du scoutisme et de jeunes militants du PPA, du MTLD et de l'UDMA. C'est dire que l'adéquation «SMA-Jeunesse des Partis et des Médersas» a été très bénéfique. Le creuset était là, et c'est de là seulement qu'émergea un noyau très dynamique à l'issue du Congres historique du PPA-MTLD, les 15 et 16 février 1947. Ce noyau s'appelait l'OS (Organisation Secrète), une organisation paramilitaire qui a été confiée à Mohamed Belouizdad, un jeune de 23 ans. Ce dernier s'était dépensé sans compter, avec foi et sincérité pour le triomphe de la cause algérienne. Il avait comme adjoints, dans son état-major, des hommes qui feront parler I'Histoire, comme Mohamed Boudiaf, Hocine Aït Ahmed, Ahmed Ben Bella et autres Djillali Reguimi et Abdelkader Belhadj Djillali.
Au niveau de cette organisation commençait la sérieuse préparation pour le déclenchement de la révolution, par l'achat des armes, l'instruction militaire et la formation de cellules, de groupes et d'autres structures territoriales.
Peu de temps après, Belouizdad a été remplacé, à cause de sa maladie, par Aït Ahmed, lequel a été à son tour remplacé, en 1949, par Ahmed Ben Bella. Une année après, les services de police française, qui suivaient de près cette organisation, ont procédé à une série d'interpellations et de perquisitions sur toute l'étendue du territoire national. Ce «coup de filet» a été décidé après l'arrestation d'un militant de l'OS, dans l'Est algérien, et de ce fait l'organisation a été pratiquement démantelée. Les autres militants et dirigeants qui n'ont pas été arrêtés parce qu'ils s'étaient refugies dans la clandestinité ou avaient pris carrément le maquis, ne désemparaient pas devant cette hécatombe et menaient un travail colossal pour réanimer l'organisation et être prêts pour le déclenchement de la lutte armée. Ces dirigeants s'appelaient Didouche Mourad, Larbi Ben M'Hidi, Rabah Bitat, Abderrahmane Bensaïd, Brahim Chergui, Lakhdar Bentobbal, Djillali Reguimi, Krim Belkacem, Mohamed Boudiaf, Abdallah Fillali, Abdelkader Rebbah, Sid Ali Abdelhamid, Souihah Houari et d'autres sur l'étendue du territoire. Ce sont ceux-là ou certains qui iront, sous la conduite de Boudiaf, créer le CRUA (Comité Révolutionnaire pour l'Unité et l'Action), en mars 1954, après avoir vécu deux événements, certes importants, mais qui n'allaient pas infléchir leur position à l'égard de la lutte armée: l'arrestation de Messali Hadj, le 14 mai 1952 et sa déportation à Niort, en France, et le 2e Congrès du PPA-MTLD qui s'est tenu en avril 1953.
Ils étaient «22» dans cette nouvelle organisation du CRUA; des anciens de l'OS qui s'étaient mis d'accord pour discuter des modalités pratiques de la lutte de libération nationale et désigner une direction de 6 personnes, composée des frères Boudiaf, Ben Boulaïd, Didouche, Ben M'Hidi, Bitat et Krim Belkacem. Cette réunion historique au cours de laquelle les dirigeants du CRUA ont décidé de rentrer dans le concret et de passer à l'action, s'est déroulée en juin 1954, à El-Madania, sur les hauteurs d'Alger. Ces derniers allaient prendre sérieusement en charge l'organisation du déclenchement de la révolution dans les zones qui partageaient le territoire national pendant qu'ailleurs, dans les anciennes formations, on «tergiversait» dans des réunions stériles ou on «s'éliminait» dans les directions, tout en restant neutres dans le conflit qui secouait le Parti.
Le 23 octobre 1954, les six dirigeants du CRUA se rencontraient en une ultime réunion -la plus positive dans l'Histoire du pays -sur la côte Ouest d'Alger, à Raïs Hamidou (Pointe-Pescade), dans la demeure du militant Mourad Boukechoura et décidaient de mener la guerre au colonialisme français sous la bannière du Front de Libération Nationale (FLN). C'est pendant cette mémorable et historique réunion que furent adoptés les sigles du FLN et de l'ALN, et c'est à Ighil lmoula, un petit village perché sur l'un des versants du Djurdjura, que sortit la proclamation du FLN appelée officiellement la «Déclaration du 1er Novembre». Ainsi, le 1er Novembre 1954, à minuit, l'Algérie s'était enflammée. Partout le même slogan, les mêmes motivations, le même idéal, la même assurance chez les combattants de la liberté et les militants qui comprenaient l'ampleur et la justesse de la cause. Partout en Algérie, des jeunes qui étaient au commandement, dans les principales régions, voulaient démontrer que ce n'était pas simplement un mouvement insurrectionnel qui allait s'atténuer avec le temps, mais une politique de décolonisation, soigneusement préparée, mûrement réfléchie, qui poussait de toutes ses racines, et qui sera consciemment menée, à travers un combat légitime.
La Révolution de Novembre a été l'oeuvre de tous ces jeunes qui ont défié les prévisions de cette puissance coloniale, appuyée par l'OTAN, et qui ont suscité l'admiration du monde parce que leur combat a été d'une ampleur telle que «les sacrifices consentis sont bouleversants par leur étendue et ont peu d'équivalents dans l'Histoire universelle».
Voici, pour le lecteur, principalement le jeune, une rétrospective modeste sur le combat de notre peuple, depuis l'avènement du colonialisme français, une rétrospective qui explique que le recouvrement de notre souveraineté nationale est l'aboutissement d'un long processus de décolonisation que le 1er Novembre venait de couronner. Ainsi, en conclusion, nous pouvons dire que cette guerre d'indépendance que nous considérons comme le début de la fin, n'était pas le fait d'une réaction intempestive de quelques «révoltés», mais l'engagement de tout un peuple et ses nombreux sacrifices qui ont abouti à la libération de notre pays de l'emprise colonialiste.



03/11/2011
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