L\'Emir Abd el Kader

IBN ARABÎ : PRINCIPALES DATES

 

merci au blog de :Saadane Benbabaali, Maître de conférences à Paris 3 Sorbonne Nouvelle

 

 

IBN ARABÎ : PRINCIPALES DATES

 
I. Époque andalouse

27 juillet 1165 : naissance à Murcie, au sud-est d’al-Andalus (17 Ramadân 560) ou , selon d’autres sources, le 6 août (27Ramadân 560 ).
Vers 1173 : dès l’âge de huit ans, le petit garçon part à Séville après l’occupation de Murcie par les Almohades. Il commence son instruction (Coran, tafsîr, Hadith, sharî‘a, grammaire, rhétorique).
Il aurait servi comme kâtib auprès de plusieurs gouverneurs.
Il contracte un premier mariage avec une jeune fille dont il parle en termes d’une respectueuse dévotion, et qui semble avoir exercé une influence réelle sur l’orientation de sa vie vers le soufisme.
C’est à cette époque que se manifestent déjà les aptitudes visionnaires d’Ibn Arabi. Il tombe gravement malade, la fièvre entraîne un état de profonde léthargie.
Deux amitiés spirituelles féminines , une double amitié filiale pour deux vénérables femmes soufies, deux shaykhât : Yasmine de Marchena et Fatima de Cordoue.
Un incident survenu dans la Mosquée de Cordoue constitue le point de rupture dans le cours jusque-là paisible du jeune Ibn Arabi. L’adolescent quitte tout : l’armée, ses compagnons, ses biens. Il se retire du monde pour un face-à-face avec Dieu dont il ne reviendra jamais
1179 : rencontre avec le philosophe Ibn Rushd. (Fut. I, 235)
Une dizaine d’années dans diverses villes d’Espagne et du Maghreb avec ses maîtres, mais demeura attaché à Séville.
1184 : il est initié à la voie soufie ( ?). Il servit de nombreux shaykh dont il rechercha la compagnie, notamment Abû Dja’far al-‘Uraynî, Abû Ya’qûb al-Qaysî, disciple d’Abû Madyan.


II. Voyages au Maghreb et en Espagne

1193, il quitte l’Espagne pour le Maghreb.
Il rend visite à Tunis au sheikh al-Mahdawi à qui sera dédié « Rûh al-Quds ».
Rencontre avec al-Khâdir.
1194, à Fès : il prédit la victoire de l’almohade Ya‘qûb al-Mansûr sur les Chrétiens.

1198-99/595 : retour en Andalus
Ronda : où il rencontre b. Ashraf al-Rundî, l’un des sept Abdâl.
Séville : il fait ses adieux à ses maîtres sévillans.
Cordoue : il assiste à l’enterrement d’Ibn Rushd
Alméria : à la suite d’un Ordre divin, il écrit « Mawâqi‘al-Nudjûm » en onze jours à l’attention de Habâshî.

2e voyage au Maghreb
1200/597 :
Salé : il fait ses adieux au sh. Al-Kûmî.
Îjisâl : il atteint la « Demeure de la Proximité » ou Identité suprême.

1200-01/ 597
Marrakech : il a la vision du Trône divin. Il reçoit l’Ordre de partir pour l’Orient en compagnie de M. al-Hassâr ;
Fès : Rencontre avec M. al-Hassâr
Bougie : il rajoute un chapitre relatif au coeur dans une copie des Mawâqi‘al-nudjûm
Tunis : il fréquente le shaykh. al-Mahdawî

1201/598
Il quitte définitivement l’Occident pour l’Orient.

III. Voyages en Orient

1202/ ramadan 598 :
Le Caire
Hébron : il se recueille sur la tombe d’Abraham.
Jérusalem : la Mosquée d’Al Aqsâ.
Médine : visite au tombeau du Prophète.
La Mecque : Il se voit consacré Sceau de la Sainteté Muhammadienne.
Rencontre avec al-Fatâ al-fâ’it en qui il lit les secrets spirituels qui seront consignés dans les Futûhât.
Liaison étroite avec imam du sanctuaire d’abraham, Abû Shudjâ‘ b. Rustum et sa fille Nizâm, inspiratrice du Tardjumân.

1202-03/599 :
Reçoit la khirqa de Yûnusb. Yahyâ al-Hâshimî
Vision de la Ka‘ba de briques d’or et d’argent.

1203/12 djumâda 599
Taif : il se recueille auprès du tombeau de ‘Abdallah Ibn ‘Abbâs.
Rédaction de Hilyat al-abdâl.

Rabî‘ 600/ nov. 1203
La Mecque : Mishkât al-Anwâr, Tâj al-Rasâ’il et Rûh al-Quds.
Il entreprend la composition de sa somme métaphysique : al-Futûhât al-Makkiyya.

600/1204 :
Il rencontre à la Mecque un certain nombre de pélerins anatoliens conduits par le père de Sadr al-Dîn al-Qûnâwî. Il les accompagne dans leur voyage de retour par Baghdad et al-Mawsil où il reçut de Khidhr la khirqa ou investiture.
Al-Tanazzulât al-Mawsiliyya.

1206 : arrivé en Anatolie, il fut reçu par le sultan de Konya Kay-Khusraw qui le combla de présents.
De retour au Caire avec un groupe de soufis andalous. Il part ensuite à la Mekke en parcourant la Palestine.

1207, à la Mekke, il continue à étudier le Hadith.

1209, Alep, il autorise la diffusion de son traité des Théophanies (al-Tadjalliyyât).
Rédige Risâlat al-Anwâr.

1210, il est de retour à Konya, où il rencontre Sadr ad-Dîn de Konya, un de ses plus grands disciples qui devient son beau-fils. Il sera son commentateur avisé.

1211-12, on le retrouve à Bagdad, il rencontre le Grand sheikh, Shihâb al-Dîn ‘Umâr al-Suhrawardî. Il adresse au roi Kay Kâ’ûs, son protecteur une lettre de conseils pratiques sur des questions religieuses.

1213, Alep.

1214, La Mekke. Il rédige son recueil de poésies : Tardjumân.

1215, à Alep, il commence le sharh de son Turdjumân, Dhakhâ’ir al-A ‘lâq.

De 1215 à 1219, à Malatya, invité par le roi Kay Kaus. Son fils Sa‘d al-Dîn Muhammad y naîtra.
Il accorde des licences pour certains de ses ouvrages : Kitâb maqâm al-Qurba et Manzil al-Manâzil.

IV. Damas

On ne sait pas quand ni pourquoi, il quitta l’Anatolie pour s’installer définitivement à Damas. Invité par son souverain al-Malik al-‘Âdil, il y restera jusqu’à sa mort en 1240/ 638.
Il fut l’objet de la critique des Orthodoxes mais il trouva des protecteurs parmi les Ayyûbides. Il y mena cependant une vie calme de lecture et d’enseignement. Il composa, à la suite d’un songe qu’il eut en 1229, l’ouvrage qui eut le plus d’influence : le Fusûs al-Hikam, véritable somme condensée de ses positions doctrinales fondamentales. Il revoit et complète ses Futûhât et achève son recueil de poèmes : al-Dîwân al-akbar.
Ibn ‘Arabî mourut à Damas le 16 Novembre 1240 (28 Rabî‘al-thânî) et fut inhumé dans le mausolée (turba) de la famille du qâdî Muhyi al-Dîn ibn al-Zakî.
Ibn ‘Arabî se maria plusieurs fois et eut probablement beaucoup d’enfants, mais on n’en connaît que deux.

V. Épilogue

1517-18 : Le sultan ottoman Selim 1er, alors qu’il se trouvait à Damas après sa campagne d’Égypte, ordonna la réfection de la turba où Ibn ‘Arabî était enterré et la construction, à proximité, d’une mosquée et d’une takkiyya ; à cette occasion une fatwa à la louange d’Ibn ‘Arabî fut délivrée.

Source :
C. ADDAS :
1. Le Voyage sans retour
2. Ibn Arabi ou la quête du soufre rouge
 
Tombeau d'Ibn Arabi à Damas, mosquée Mont Quassioun
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Mosquée où est enterré Ibn Arabi à Damas (1)

Pour Ibn ‘Arabî, la voie spirituelle est essentiellement une voie d’amour. Il en est ainsi parce que Dieu est essentiellement miséricorde. D’après un hadith qudsî[12] : « Certes, Dieu le Très-Haut écrivit pour Lui-même, lorsqu’Il créa le monde : ‘‘En vérité, Ma miséricorde l’emporte sur Ma colère.’’ »[13]

A l’inverse, lorsque l’amour est absent des cœurs, un juridisme vide et desséchant tient alors lieu de ferveur et de zèle. Ibn ‘Arabî a toujours dénoncé les dérives de certains juristes, comme il le rappelle lui-même : « Que Dieu te garde, mon frère, des pensées mauvaises en t’imaginant que je blâme les juristes en tant que tels ou pour leur travail de jurisprudence, car une telle attitude n’est pas permise à un Musulman et la noblesse du fiqh n’est pas à mettre en doute. Toutefois, je blâme cette sorte de juristes qui, avides des biens de ce monde, étudient le fiqh par vanité, pour qu’on les remarque et que l’on parle d’eux, et qui se complaisent dans les arguties et les controverses stériles. Ce sont de telles gens qui s’attaquent aux hommes de l’Au-delà, à ceux qui craignent Dieu et reçoivent une science de chez Lui (min ladunHu). Ces juristes cherchent à réfuter une science qu’ils ne connaissent pas et dont ils ignorent les fondements. »[14]

Mosquée où est enterré Ibn Arabi à Damas (2)


Dans le chapitre 178 des Futuhât qu’Ibn ‘Arabî consacre à l’amour, il distingue trois types d’amour : l’amour naturel (tabî‘î) ou élémentaire (‘unçûrî), l’amour spirituel (rûhânî) et l’amour divin (ilâhî). L’amour naturel se caractérise par l’égocentrisme et la possessivité : « L’origine de l’amour naturel n’est autre que le bien-être (in‘âm) et le bienfait (ihsân) procurés par l’être aimé, car le naturel de l’être n’est jamais capable d’aimer l’autre pour lui, c’est uniquement pour soi qu’il aime les choses en désirant s’y unir ou s’en rapprocher, comme cela a lieu chez l’animal ou l’homme pour l’animalité qui est en lui. » [15]

L’amour spirituel, quant à lui, présuppose un dépassement de l’égocentrisme, et confère donc une certaine sagesse : « Sache que dans l’amour spirituel, l’amant verra son intellect et sa science illuminées par la sagesse : il sera sage par son intellect et par sa sagesse, il sera savant… C’est dire qu’il saura ce qu’est l’amour, quelle en est la signification et quelle en est la réalité… »[16]

L’amour divin, enfin, désigne l’amour que Dieu porte à Ses créatures. Pour Ibn ‘Arabî, cet amour est notamment prouvé par la générosité de Dieu qui accorde toutes sortes de bienfaits sans mérite préalable des créatures et sans reconnaissance de leur part en retour. Parmi ces bienfaits se trouvent l’existence puis la conscience et l’intelligence de l’Homme : « Quant à l’amour que Dieu nous porte pour nous-mêmes, Il s’exprime par le fait que Dieu nous a fait connaître ce qu’est notre bien en cette vie et dans l’autre. Il nous a prodigué les preuves de Sa science pour que nous Le connaissions et que nous ne soyons pas enfermés dans l’ignorance. De plus, Il nous accorde la subsistance et nous comble de faveurs bien que nous y soyons inattentifs… »[17]

Ajoutons encore quelques précisions sur le lien existant entre l’amour et la connaissance, lesquels sont toujours liés dans la voie spirituelle : « La connaissance de Dieu engendre toujours l’amour, et l’amour présuppose une connaissance – au moins indirecte et par reflet – de l’objet aimé. L’amour spirituel a pour objet la Beauté divine, qui est un aspect de l’Infinité ; par cet objet, le désir devient lucide… C’est par son objet, la Beauté, que l’amour coïncide virtuellement avec la connaissance. »[18]

Comme aime à la souligner Ibn ‘Arabî, l’amour est la raison même de la création du monde : « Dans le Coran, l’amour se trouve mentionné à maints endroits et il existe de nombreux hadiths sur l’amour tels les suivants : Le Prophète – sur lui la grâce et la paix – a dit de la part de Dieu : ‘‘J’étais un Trésor caché ; Je n’étais pas connu. Or, J’ai aimé être connu. Je créai donc les créatures et Je Me fis connaître à elles de sorte qu’elles Me connurent.’’ Il résulte de ce contexte que Dieu nous a créé [par amour] pour Lui seul… Le Prophète – sur lui la grâce et la paix – a dit : ‘‘Dieu déclare : Mon serviteur ne saurait se rapprocher de Moi par rien qui Me soit plus agréable que l’accomplissement de ce que Je lui ai prescrit. Mon serviteur ne cessera de se rapprocher de Moi par des œuvres surérogatoires jusqu’à ce que Je l’aime.

Et lorsque Je l’aime, Je suis son ouïe par laquelle il entend, son regard par lequel il voit, sa main par laquelle il saisit, et son pied avec lequel il marche ; s’il Me demande une chose, Je la lui accorderai, et s’il cherche auprès de Moi asile, assurément, Je le lui offrirai.’’[…]Un autre hadith affirme : ‘‘Dieu est Beau et Il aime la Beauté.’’… Les hadiths sont nombreux à ce sujet. Sache que la station spirituelle de l’amour est une distinction élevée et que l’amour est le principe (açl) de l’Existence universelle (wujûd). »[19]

En guise de conclusion, nous laisserons l’ultime parole à Ibn ‘Arabî et à sa poésie inspirée. Ce grand maître de sagesse a su exprimer de manière inégalée les vérités les plus subtiles par des vers d’une grande beauté :

De l’amour nous sommes issus.
Selon l’amour nous sommes faits.
Vers l’amour nous tendons.
A l’amour nous nous adonnons.
[20]

 
 
13] Cité par Tirmidhî. Hadith reconnu authentique (sahîh).

[14] Les Soufis d’Andalousie, éd. Actes Sud, 1995, p.95. (Trad. fr. : R. W. J. Austin – G. Leconte)

[15] Futuhât al-Makkiyya., II, p.334. Une traduction de ce chapitre des Futuhât a été réalisée par Maurice Gloton : Traité de l’amour, éd. Albin Michel, 1986.

[16] Fut., II, p.332.

[17] Fut., II, p.328.

[18] Titus Burckhardt, Introduction aux doctrines ésotériques de l’Islam, éd. Dervy, 1985, pp.43-44.

[19] Fut. II, p.322-323.

[20] Fut. II, p.323. Traduction de Maurice Gloton.

 


26/08/2012
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